Le test K-STARTS : entre validité scientifique et limites d’application en clinique

Le retour au sport après une blessure du genou, notamment après une reconstruction du ligament croisé antérieur (LCA), repose sur des tests fonctionnels destinés à objectiver les capacités physiques du patient. Parmi eux, le K-STARTS (Knee Santy Athletic Return To Sport) s’est imposé comme une référence, grâce à sa validité, sa fiabilité et sa reproductibilité (1). Cependant, si ces tests sont des outils précieux, ils présentent des limites qui méritent d’être prises en compte pour une meilleure intégration en clinique.

Par Florian Forelli, Kinésithérapeute.

Le test K-STARTS: entre validité scientifique et limites d'application en clinique

Une méthode validée scientifiquement

Le test K-STARTS: entre validité scientifique et limites d'application en clinique

Le test K-STARTS repose sur une approche combinant évaluations physiques et psychologiques, offrant une vision plus globale du patient. Plusieurs études ont confirmé sa validité et sa fiabilité (1–3) :

  • Il présente une forte reproductibilité, avec un coefficient de corrélation intra-classe (ICC) de 0,87, ce qui signifie que les résultats sont cohérents d’un test à l’autre.
  • Il est sensible aux changements, ce qui permet de suivre l’évolution du patient dans le temps.
  • Son intégration d’une échelle psychologique (évaluation de la confiance du patient envers son genou) en fait un outil plus complet que les tests purement biomécaniques.

Malgré ces qualités, plusieurs limites freinent son adoption en clinique et en cabinet libéral.

Un manque d’écologie et de spécificité

Les tests K-STARTS sont souvent réalisés dans des conditions standardisées, avec un environnement contrôlé qui ne reflète pas la réalité du terrain (4). Or, le retour au sport implique de multiples facteurs tels que :

  • Les irrégularités du terrain,
  • Les réactions imprévues face à un adversaire (5)
  • La fatigue progressive au cours d’un match ou d’un entraînement (6,7).

Les tests actuels se focalisent sur des critères biomécaniques comme la force et la symétrie entre les jambes, mais n’intègrent pas ces contraintes réelles (4). Cela pose la question de leur pertinence pour prédire efficacement la capacité à revenir au sport sans risque de récidive (8).

Une évaluation davantage adaptée aux sportifs à niveau d’intensité élevé

Les bases de données qui valident les tests K-STARTS reposent principalement sur des études réalisées sur des sportifs à niveau d’intensité élevé. Si ces tests sont bien adaptés aux athlètes de haut niveau ou semi-professionnels, ils peuvent ne pas être aussi pertinents pour :

  • Les sportifs amateurs,
  • Les personnes souhaitant simplement retrouver une activité physique régulière,
  • Les patients ayant des besoins fonctionnels sans objectif sportif intense.

Par conséquent, appliquer les résultats du K-STARTS à toutes les populations de patients pourrait conduire à des recommandations inadaptées.

Le test K-STARTS: entre validité scientifique et limites d'application en clinique

Une faible adaptabilité en cabinet de kinésithérapie

En cabinet libéral, les contraintes matérielles et spatiales rendent souvent difficile la mise en place du K-STARTS dans des conditions optimales. Les kinésithérapeutes doivent parfois adapter les tests, ce qui peut :

  • Créer une variabilité des résultats,
  • Rendre les comparaisons entre patients ou avec la littérature plus complexe.

Une adaptation du K-STARTS pour un usage en cabinet, avec des alternatives plus accessibles, permettrait une meilleure diffusion et exploitation des tests.

Une absence d’intégration des tâches cognitives

Le test K-STARTS: entre validité scientifique et limites d'application en clinique

Le sport ne repose pas uniquement sur la performance physique. Des éléments comme :

  • La gestion du stress et de l’appréhension,
  • La capacité à prendre des décisions rapides,
  • L’anticipation des mouvements adverses

sont essentiels pour un retour au sport réussi. Pourtant, le K-STARTS n’inclut aucune évaluation cognitive, ce qui peut le rendre incomplet pour juger de la préparation réelle du patient (9,10).

Un test ponctuel vs un suivi kinésithérapique continu

Un des principaux points faibles du K-STARTS est qu’il s’agit d’un test à un instant donné. Or, les performances d’un patient peuvent varier d’un jour à l’autre en fonction de :

  • La fatigue accumulée,
  • La motivation,
  • L’état psychologique.

En comparaison, un suivi régulier avec un kinésithérapeute permet d’observer l’évolution du patient sur la durée et d’ajuster la prise en charge en fonction de ses besoins (11,12). Un seul test ne peut donc pas remplacer une approche dynamique et adaptée à chaque individu.

Conclusion : vers une approche plus adaptative et individualisée

Le K-STARTS est un test validé scientifiquement, fiable et reproductible, ce qui en fait un outil précieux pour objectiver le retour au sport. Toutefois, son application souffre de limitations importantes :

  • Un manque d’écologie et de spécificité,
  • Une focalisation sur les sportifs à niveau d’intensité élevé,
  • Une adaptabilité limitée en cabinet,
  • L’absence de tâches cognitives,
  • Une variabilité des résultats en fonction de l’état du patient.

Plutôt que de s’appuyer uniquement sur un test ponctuel, l’avenir du retour au sport devrait intégrer une approche dynamique, combinant des tests objectifs et un suivi kinésithérapique adapté à chaque patient. Une méthodologie plus souple et contextualisée permettrait d’optimiser les chances d’un retour au sport sécurisé et durable.

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REFERENCES

  1. Blakeney WG, Ouanezar H, Rogowski I, Vigne G, Guen ML, Fayard JM, et al. Validation of a Composite Test for Assessment of Readiness for Return to Sports After Anterior Cruciate Ligament Reconstruction: The K-STARTS Test. Sports Health Multidiscip Approach. nov 2018;10(6):515‑22.
  2. Fayard JM, Thaunat M, Vigne G, Chambat P, Ouanezar H, Le Guen M, et al. Validation du test composite K-STARTS dans l’évaluation des capacités de retour au sport après plastie du ligament croisé antérieur. Rev Chir Orthopédique Traumatol. déc 2018;104(8):S76.
  3. Franck F, Saithna A, Vieira TD, Pioger C, Vigne G, Rogowski I, et al. Facteurs influençant le score du test de retour au sport KSTARTS après reconstruction du ligament croisé antérieur. Une analyse rétrospective de 676 patients. Rev Chir Orthopédique Traumatol. déc 2019;105(8):S126.
  4. Forelli F, Le Coroller N, Gaspar M, Memain G, Kakavas G, Miraglia N, et al. Ecological and Specific Evidence-Based Safe Return To Play After Anterior Cruciate Ligament Reconstruction In Soccer Players: A New International Paradigm. Int J Sports Phys Ther [Internet]. 2 avr 2023 [cité 19 août 2023];18(2). Disponible sur: https://ijspt.scholasticahq.com/article/73031-ecological-and-specific-evidence-based-safe-return-to-play-after-anterior-cruciate-ligament-reconstruction-in-soccer-players-a-new-international-para
  5. Fernandes CA, Norte GE, Schwab SM, Gokeler A, Murray A, Bazett-Jones DM, et al. Interpersonal Coordination between Female Soccer Players: Leader-Follower Roles within a Collision-Avoidance Task. Int J Sports Phys Ther [Internet]. 1 mai 2024 [cité 31 mars 2025];19(5). Disponible sur: https://ijspt.scholasticahq.com/article/116156-interpersonal-coordination-between-female-soccer-players-leader-follower-roles-within-a-collision-avoidance-task
  6. van Melick N, van Rijn L, Nijhuis-van der Sanden MWG, Hoogeboom TJ, van Cingel REH. Fatigue affects quality of movement more in ACL-reconstructed soccer players than in healthy soccer players. Knee Surg Sports Traumatol Arthrosc. févr 2019;27(2):549‑55.
  7. Gokeler A, Eppinga P, Dijkstra PU, Welling W, Padua DA, Otten E, et al. Effect of fatigue on landing performance assessed with the landing error scoring system (less) in patients after ACL reconstruction. A pilot study. Int J Sports Phys Ther. mai 2014;9(3):302‑11.
  8. Forelli F, Traulle M, Bechaud N, Sansonnet C, Marine P, Vandebrouck A, et al. Predict Anterior Cruciate Ligament Injury In Elite Male Soccer Players? Focus On The Five Factors Maximum Model. Int J Physiother [Internet]. 1 déc 2021 [cité 29 oct 2024];8(4). Disponible sur: https://ijphy.com/index.php/journal/article/view/1093
  9. Dourver A, Rambaud A, Forelli F. La neuroplasticité au cœur de la rééducation du ligament croisé antérieur. J Traumatol Sport. déc 2023;40(4):226‑33.
  10. Forelli F, Coulondre C, Calvino S, Riera J, Rambaud A. Influence du système visuel dans les performances motrices après lésion et/ou chirurgie du ligament croisé antérieur : une revue narrative. J Traumatol Sport. déc 2023;40(4):219‑25.
  11. Forelli F, Moiroux-Sahraoui A, Nielsen-Le Roux M, Miraglia N, Gaspar M, Stergiou M, et al. Stay in the Game: Comprehensive Approaches to Decrease the Risk of Sports Injuries. Cureus [Internet]. 27 déc 2024 [cité 5 janv 2025]; Disponible sur: https://www.cureus.com/articles/326803-stay-in-the-game-comprehensive-approaches-to-decrease-the-risk-of-sports-injuries
  12. Forelli F, Bouzekraoui Aloui I, Mazeas J, E Hewett T, Douryang M. Strategies for Injury Prevention and Enhancing Performance. Tunis J Sports Sci Med. 2024;2(3):1‑5.